Dans ce billet je fais part de mon expérience avec les vidéo projecteurs Sony VPL-VW550ES et VPL-VW520ES mis en œuvre pour la reproduction HDR/REC2020 dans deux environnements très différents et avec des toiles très différentes (blanche sans gain et technique grise Xtrem Screen Daylight 0.9).
Les prises de mesures se sont déroulées dans les conditions suivantes:
Le Sony VPL-VW550ES a été évalué dans ma salle dédiée qui est totalement noire via un écran blanc: murs avec tissu acoustique noir, sol avec moquette noire et plafond avec des dalles acoustiques noires. Les dimensions de ma salle sont les suivantes : 6.5m x 4m x 2.35m.
Le Sony VPL-VW520ES a été évalué dans un salon avec une toile grise technique Daylight 0.9 de Xtrem Screen. Tout l’environnement de projection est décrit dans l’article que j’avais déjà rédigé au sujet de l’installation de mon ami Christophe.
Les matériels et moyens utilisés étaient les suivants :
Pour évaluer les calibrations, j’ai utilisé 1493 couleurs – dites de référence pour ce test. Ce sont les 1493 couleurs que je vérifie systématiquement pendant mes prestations de calibration.
Sachant qu’une couleur est la somme de 3 composantes, le rouge, le vert et le bleu, que chaque composante peut être codée numériquement sur 8 bits avec une valeur comprise entre 0 et 255 alors toutes les couleurs peuvent se représenter graphiquement dans un cube dont la structure principale est construite de la manière suivante:
Ci-dessous la représentation en 3D des couleurs utilisées pour vérifier les calibrations.
Pas de screenshot cette fois-ci, avec toutes mes excuses pour ceux qui auraient préféré qu’il y en ait. Par contre j’ai visionné les titres suivants pour valider les différentes calibrations, dans leur version Blu-ray 1080p SDR/REC709 et dans leur version Blu-ray 4K UHD HDR/REC2020, avec bien entendu les vidéo projecteurs calibrés conformément au type de Blu-ray visionné:
Comme à mon habitude je vous propose la conclusion de mes analyses dès le début de l’article. La voici :
Avec les Sony VPL-VW550ES et VPL-VW520ES, nous avons franchi un cap dans l’intégration du HDR et c’est sans hésitation que je peux affirmer que ces machines permettent d’obtenir un rendu tout à fait cohérent, qui apporte enfin un réel gain par rapport au SDR et dévoile par la même occasion tout le potentiel que nous réserve cette nouvelle technologie dont la marge de progression est tout bonnement énorme.
Vous l’aurez compris, les tests que j’ai menés à la fois sur une toile blanche dans ma salle dédiée et sur la toile Xtrem Screen Daylight 0.9 dans un salon m’ont totalement convaincu. L’expérience HDR fut bel et bien au rendez-vous que ce soit avec le Sony VPL-VW550ES ou le Sony VPL-VW520ES. Malheureusement je ne suis pas en mesure de partager avec vous des photos (screenshot) pour illustrer mon enthousiasme car, même si je m’y suis essayé à plusieurs reprises, aucun cliché n’a jamais réussi à retranscrire le dynamisme de l’image obtenue avec le HDR. C’est donc via les explications techniques que je développe plus loin dans ce billet que vous trouverez matière à étayer mon propos.
Avant cela et pour finir cette conclusion, voici 3 questions fondamentales auxquelles je vais répondre et que je vous encourage à vous poser si vous décider de passer à la vidéo projection HDR:
A la première question, je réponds sans hésitation qu’avec le Sony VPL-VW550ES ou le VPL-VW520ES le HDR est devenu une réalité technique sur laquelle il faut compter. Nous ne sommes plus dans le domaine du simple effet d’annonce ou marketing. De plus, Sony propose des machines performantes capables de reproduire aux alentours de 100 cd/m² (ou nits) pour des bases jusqu’à 2.6m en 16/9ieme embarquant des outils qui permettent d’adapter le HDR à son environnement dont le rendu est encore plus tributaire qu’avec le SDR.
La deuxième question amène une réponse plus complexe car la norme qui définit le HDR n’a clairement pas été écrite pour la vidéo projection mais pour la télévision. C’est un fait. Y répondre par l’affirmative serait donc erroné. Mais Sony a su contourner ce problème, en adaptant les recommandations des normes aux contraintes de la vidéo projection et cela s’est avéré payant puisque le résultat est vraiment au rendez-vous : le HDR avec les Sony VPL-VW550ES et VPL-VW520ES ça fonctionne, et même très bien d’ailleurs.
A la dernière question je répondrai simplement ceci: je possède un vidéo projecteur JVC X35 (1080p et SDR/REC709) qui m’apporte à chaque séance une expérience en vidéo projection vraiment exceptionnelle. L’expérience HDR avec les deux Sony testés m’a tellement séduit que si je n’avais pas d’autres projets déjà lancés, j’achèterais sans hésitation un Sony VPL-VW550ES car pour moi, oui, l’effort financier en vaut désormais vraiment la peine.
Ci-dessous vous trouverez une analyse la plus objective possible pour étayer cette conclusion.
Le graphique ci-dessous représente le spectre lumineux mesuré à l’aide du spectromètre de référence CR-250RH. Sur la base de ces données, il a été établit une matrice de correction pour le colorimètre CR-100 afin que ce dernier soit parfaitement réglé pour évaluer et optimiser le vidéo projecteur.
Les mesures réalisées en mode HDR/REC2020 l’ont été avec la lampe dans son mode HAUT.
Note : sauf mention contraire, les captures d’écrans pour les courbes sont toutes issues du logiciel professionnel de calibration LightSpace CMS.
Il n’y a pas de raisons particulières à vouloir trop s’attarder sur les résultats obtenus dans ce mode car comme d’habitude avec Sony,il est correctement géré sans aucun réglage et il devient très performants après calibration, que ce soit en calibration manuelle ou via une 3DLUT. Le mode REFERENCE sera le mode à privilégier pour la lecture de Blu-ray 1080p SDR/REC709.
Le Sony VPL-VW550ES se comporte de la même manière que le Sony VPL-VW520ES que j’avais évalué dans le mode SDR/REC709 dans ma salle et dont le compte rendu est accessible en cliquant ICI.
Pour faire une calibration HDR il faut impérativement utiliser un générateur de mires capable de gérer toute la partie méta données associée au HDR/REC2020. A ma connaissance il n’en existe que trois pour le moment intégrant cette fonctionnalité : le MURIDEO SIX-G, l’ACCUPEL DGA-6000 et le Lumagen Radiance PRO. Pour ma part c’est ce dernier que j’utilise pour réaliser ce dossier et mes calibrations professionnelles.
Quand la source compatible 4K UHD HDR/REC2020 envoie son signal issu d’un Blu-ray 4K HDR/REC2020 au vidéo projecteur, sont inclues différentes informations techniques au sein de ce signal (contenues dans les fameuses méta données encodées dans sur le disque Blu-ray lui-même) avec notamment la plage dynamique (SDR ou HDR) et l’espace de couleur (REC709 ou REC2020) avec lesquels le Blu-ray a été mastérisé.
Avec un Blu-ray 4K HDR/REC2020 joué par un lecteur compatible, le Sony VPL-VW550ES ou VW520ES active automatiquement son mode HDR et son mode REC2020 car l’encodage du Blu-ray a été fait de cette manière.
Je recommande d’utiliser le profil utilisateur CINEMA LUMINEUX avec D65 comme référence pour le point blanc. C’est celui qui donnera la meilleure base possible pour se lancer dans une calibration ou tout simplement profiter du Blu-ray 4K UHD. Le contraste HDR devra se situer entre 70 et 100.
Ci-dessous la courbe HDR mesurée (la courbe bleu) pour les deux Sony au regard de ST2084 à 1000 nits (la courbe de référence noire) qui répond aux exigences de UHD premium écrites pour le cas particulier de la reproduction HDR avec les téléviseurs de dernière génération. A gauche, les mesures faites avec le Sony VPL-VW550ES et la toile blanche sans gain, à droite avec le Sony VPL-VW520ES avec la toile Xtrem Screen Daylight 0.9.
On voit clairement que nous sommes loin du compte. La dynamique des deux Sony semble totalement tassée même si avec ma toile blanche sans gain ils permettent d’obtenir plus de 100 nits et environ 80 nits avec la Xtrem Screen Dayligth 0.9.
Es-ce normal ? Oui puisque cette référence ST2084 est faite pour les diffuseurs capables de générer un pic lumineux de 1000 nits au minimum. Voyons ce que donne alors ST2084 pour 100 nits dans le paragraphe suivant.
En fait il n’est pas possible d’utiliser une telle référence avec les deux Sony car l’intégration HDR sur ces machines ne le permet tout simplement pas, même en jouant avec le réglage de contraste HDR: ci-dessous le contraste HDR avec les valeurs 25 et 50 au regard de la référence ST2084 pour 100 nits. A gauche, le contraste HDR réglé à 25, à droite réglé à 50, la référence étant la courbe noire ST2084 à 100 nits, la courbe bleu étant celle mesurée.
Est-ce un problème ?
Non justement pas car c’est grâce à cette intégration particulière de ST2084 par Sony que le rendu HDR est cohérent avec le VPL-VW550ES et le VPL-VW520ES, je l’explique au chapitre suivant.
A des fins d’illustration seulement, regardons quand même ce que donne ST2084 à 100 nits mesurée avec le vidéo projecteur Epson TW9300 qui est capable de la reproduire (Epson TW9300 évalué récemment dans ma salle, cliquez ICI pour voir le compte rendu).
C’est parfait ! L’EOTF mesurée (courbe bleu) se confond avec la courbe de référence noire (ST2084 à 100 nits) qu’on distingue à peine mais comme indiqué dans mon dossier sur l’Epson TW9300 que vous pouvez lire en cliquant ICI, le rendu avec un film ne colle pas à ce que semble dire la théorie car l’image est beaucoup trop sombre. Pourquoi ? Tout simplement car le HDR n’est pas spécifié pour des valeurs de luminance si petite. Avec l’expérience acquise sur le sujet, je constate qu’il faut un minimum de 300 nits pour pouvoir appliquer strictement la courbe ST2084. Avec des valeurs plus petites que 300 nits, la dynamique de l’image est tassée car le vidéo projecteur, au sein d’une même image, s’il est capable de reproduire tous les détails des parties sombres, n’est pas à même de reproduire tous les détails des parties lumineuses. Le rendu est alors déséquilibré et franchement pas beau du tout.
D’accord, mais comment font les deux Sony pour s’en sortir vu qu’ils ne sortent que 100 nits au grand maximum ?
C’est ici qu’intervient le fameux coefficient multiplicateur dont je parlais déjà dans mon article sur le Sony VPL-VW520ES quand je l’avais évalué dans ma salle, pour le lire, cliquez ICI.
Nous y voilà. C’est l’application de cette « astuce » par Sony qui rend le HDR compatible avec les contraintes de la vidéo projection en home cinema. La courbe cible EOTF ST2084 est remise à l’échelle en fonction de ce coefficient. De ce que j’ai pu lire sur le net, Dolby fait plus ou moins la même chose avec son procédé Dolby Vision.
La valeur de ce coefficient pour les Sony VPL-VW550ES et VW520ES est respectivement de 4 et de 6 dans les environnements où je les ai calibré (ce ne sont pas des valeurs passe partout, il faut les évaluer par des mesures), ce qui correspond à une ST2084 à 400 nits pour pour le Sony VPL-VW550ES et 480 nits pour Sony VPL-VW520ES. J’ai donc adapté la courbe de référence ST2084 en appliquant ce coefficient puis en appliquant quelques petits ajustements sur le réglage de lumière et de contraste HDR. La fonction de transfert électro-optique (EOTF) qui en résulte après calibration pour chaque appareil est présentée ci-dessous, c’est la seule qui donne une image cohérente et criante de réalisme. A gauche, avec le Sony VPL-VW550ES et la toile blanche sans gain, à droite avec le Sony VPL-VW520ES avec la toile Xtrem Screen Daylight 0.9.
La dynamique des deux Sony est excellente. Avec ma toile blanche sans gain en salle dédiée, le Sony VPL-VW550ES permet d’obtenir plus de 100 nits et 17000:1 de contraste séquentiel et le Sony VPL-VW520ES environ 80 nits et 10000:1 de contraste séquentiel avec la Xtrem Screen Dayligth 0.9 dans un salon. C’est remarquable et cela se voit à l’écran, les noirs ne sont pas bouchés, les blancs sont éclatants et la dynamique de l’image est impressionnante.
EDIT du 02/01/2017 (précision sur l’application du coefficient multiplicateur)
Avec les Sony VPL-VW550ES et VPL-VW520ES il y a donc utilisation d’un coefficient multiplicateur pour faire une mise à l’échelle de ST2084. Par exemple, pour le VPL-VW550ES avec ses 100 nits, dans ma salle, c’est un coefficient de 4. Cela veut dire que la courbe référence correspond en tout point à ST2084 coupée à partir de 4×100 = 400 nits. Il faut un logiciel d’analyse capable d’appliquer cette mise à l’échelle pour le mesurer.
Bien entendu cette façon de coder ST2084 a une influence sur l’ensemble des couleurs et de l’échelle de gris. Le rendu est très cohérent, j’en parle au chapitre suivant.
Pour résumer et toujours avec l’exemple du Sony VPL-VW550ES:
Note: le réglage de contraste HDR permet d’adapter ce coefficient en fonction de l’environnement.
Si l’intégration de HDR (tone mapping) est désormais bien maitrisée par Sony, il reste encore du chemin à parcourir pour améliorer la justesse des couleurs (gamut mapping). Ci-dessous les résultats obtenus lors de l’évaluation du gamut mapping réalisé d’une part par le Sony et d’autre part par une 3DLUT: les croix devraient se trouver dans les ronds les plus proches. Comme vous allez le constater ce n’est pas totalement le cas. A ma grande surprise le rendu à l’image reste bon, pas autant que celui obtenu avec REC709 (blu-ray 1080p) mais c’est assez proche et surtout l’ensemble reste cohérent.
Le diagramme CIE ci-après est celui du Sony VPL-VW550ES en mode HDR/REC2020, non calibré. Celui du VPL-VW520ES est du même ordre.
Le suivant a été obtenu après application d’une 3DLUT HDR calculée par LightSpace CMS via le Lumagen Radiance PRO. Même là on constate que le résultat reste perfectible. Ce résultat en 3DLUT HDR est bien meilleur, il me donnera le cap à tenir pour la calibration manuelle.
Malheureusement pour la calibration manuelle qui s’effectue via le CMS du Sony disponible dans le menu Correction des couleurs, seuls les réglages de l’axe jaune-bleu ont un impact bénéfique sur le rendu final. Ci-dessous le diagramme CIE obtenu pour le Sony VPL-VW550ES après cette calibration:
La même chose maintenant avec le Sony VPL-VW520ES évalué sur la toile Xtrem Screen Daylight 0.9 et dans un salon. A gauche la résultat obtenu via une 3DLUT HDR calculée avec LightSpace CMS et mise en œuvre par le Lumagen Radiance PRO et à droite la calibration manuelle:
Tout simplement parce que le HDR apporte une image bien plus naturelle que le SDR. Comme je l’avais déjà écrit en avril 2015 dans mon article intitulé « HDMI 2.0a et HDR » (cliquez ICI pour le lire), le rendu HDR en home cinema devrait se rapprocher des photos HDR comme celle reproduite ci-dessous (attention ce n’est pas un screenshot d’une scène diffusée avec l’un des deux Sony testés):
Et je confirme que c’est bien ce type de rendu que j’ai pu constater avec les Sony VPL-VW550ES et VW520ES.
La profondeur de champs est immense car la luminance de chaque plan est reproduite comme l’aurait fait notre système de vision, plan par plan, si nous avions vu cette scène dans la réalité. Le coloriste qui masterise le Blu-ray 4K HDR/REC2020 voit ainsi sa marge de manœuvre d’interprétation artistique considérablement réduite et peut alors faire ce pour quoi il excelle : créer un contenu qui reproduit le plus fidèlement possible ce que le réalisateur du film a su capter avec ses caméras.
Finalement le HDR n’est qu’une manière de reproduire la dynamique que peut contenir une image, rien de plus. Le SDR avec sa courbe de gamma fut pendant longtemps le moyen le plus judicieux pour le faire. Aujourd’hui c’est avec le HDR qu’il faut compter car il apporte un gain réel pour le spectateur.
Les Sony VPL-VW550ES et VPL-VW520ES donnent un rendu très similaire ce qui est plutôt rassurant étant donné qu’ils partagent la même base hardware et le même firmware pour la gestion du HDR/REC2020.
Si votre expérience HDR avec l’un de ces deux vidéo projecteurs a été malheureuse jusqu’à présent, ne désespérait pas et essayait de demander à votre revendeur préféré une démonstration digne de ce nom afin que vous puissiez vous rendre compte dans de bonnes conditions d’intégration comment le HDR est bénéfique et comment il augmente considérablement cet effet d’immersion, cette sensation d’être assis au milieu de la scène qui se déroule devant nos yeux.
Pour aller plus loin dans mon expérience HDR et afin de continuer d’en comprendre les rouages, j’ai proposé à Sony France de faire du HDR avec le Sony VPL-VW1100ES qui, comme vous le savez déjà, n’est pas compatible -sur le papier- avec cette technologie. L’utilisation d’un processeur vidéo externe comme le Lumagen Radiance PRO permet de dépasser cette limite. Faisant déjà du HDR via cette méthode avec mon JVC X35 (avec un excellent résultat), je suis très confiant du rendu que j’obtiendrai avec le Sony VPL-VW1100ES (que j’ai déjà reçu et installé dans ma salle dédiée), impressions que je ne manquerai pas de partager avec vous, cher lecteur, dans quelques semaines au travers d’un nouvel article.
Merci à Alexandre et Performance Home Cinéma pour ce test !